Thank God, I'm not you • Ft. Grayson Ollivander

Eau bouillante enfumant très légèrement la fenêtre de la salle des professeurs. Solitude qui commence à taper sur le système. Mais solitude rapidement combattu par la présence du professeur de potion. Lui aussi comptant parmi tes nombreux anciens élèves, à croire que la Vie te fait juste une bonne vieille grosse blague pourrie en te faisant devenir collègue, petit à petit, année après année, avec tes anciens élèves. Certains et certaines t’appréciaient, d’autres beaucoup moins. Et Grayson, sans doute devait-il t’apprécier un minimum pour accepter de t’avoir comme professeur référent durant ses années d’études. Tu lui a tout appris, ou presque. Soupir trahissant tes lèvres alors que tu prépares une seconde tasse de thé, au cas où monsieur Ollivander accepterait enfin quelque chose ne venant de l’autre connasse qui lui sert de femme. Ouais. Délit de sale gueule. T’as jamais pu te l’encadrer, la Elena. Autant en tant que collègue, qu’en tant que femme de ton collègue et apprenti. Elle est toxique cette femme et tu ne te fais pas prier pour le lui rappeler, à Gray’, que tu ne la supporte pas. Mais ne vous en faites pas. Elena, elle fait son possible pour te le faire remarquer aussi, qu’elle ne t’aime pas. Parce que tu es “trop proche” de son mari adoré. En même temps, tu lui as appris à tenir une classe de cornichons. Tu as tenté de lui apprendre à avoir de la patience, de la pédagogie. Résultat ? Parfois, tu as l’impression d’avoir créé un mini Amycus. Un mini professeur Haller. LEs deux tasses prêtes, tu en déposes une fasse au potionniste dans un silence presque trop religieux pour toi. Installé sur l’un des petits fauteuils présents dans la pièce, tu croises un peu les jambes. Soucoupe de ta tasse dans une main, tasse dans l’autre.

“Tu devrais penser à faire un truc pour tes cernes mon chou. Tu ferais peur à un détraqueur. Nuit difficile ?”

C’est juste pour lancer la conversation. Parce que pour le moment, tu ne vas pas t’amuser à attaquer l’autre colérique sur ses cours, tu te dis, gentiment, qu’avec sa tronche de zombi déconfit, il a besoin d’autre chose. Tu te fais d’ailleurs un plaisir d’être plus doux avec lui. Cette relation privilégiée qu’il y a entre vous deux, elle ne date pas d’hier. Tu l’as formé de A à Z. Tu as fini par apprendre à le connaître. A apprendre à connaître sa femme . A le connaître à travers sa femme. Boisson bue partiellement, ton regard s’attarde sur ton ancien apprenti. Sur sa posture, sur sa dégaine, ses cernes, sa potentielle grosse envie de mourir. Quelque chose ne va pas avec Grayson. Tu le sais. Tu sais que cela a un rapport avec Elena également. Parce que tu l’as connu plus jeune Grayson, tu l’as connu avant Elena et tu le connaît après. Certaines choses ne trompent pas. Certains regards, certains soupirs. Depuis un long moment, le garçon Ollivander, il n’est plus lui-même. Mais cela ne te regarde pas. Absolument pas. Alors tu gardes tes réflexions pour toi. Étonnement, d’ailleurs parce que tu es plutôt du genre à tout balancer à voix haute. Mais encore une fois. C'est mercredi, le milieu de la semaine de rentrée. Grayson n’a pas besoin de ta mauvaise humeur constante et de ta trop grande franchise, ce que tu respectes. Étrangement.

“Peut-être une sieste ? Ou dormir la nuit ?”

Parce que ta connerie n’est jamais vraiment loin, tu sous-entends que si le professeur Ollivander se tape des cernes assez large pour que l’on puisse y faire cuire un steak, c’est parce qu’il ne dort pas mais qu’il “dort” avec sa femme. Devoir conjugal que tu pourrais balancer, chose que tu devrais, sans doute, un jour penser à faire. Te trouver une femme, te marier. Meh, 49 ans, sans femme, sans enfants - que tu crois - sans attache. Libre comme l’air. La vie de célibataire ne t’as jamais paru aussi douce que lorsque tu as vu Grayson pieds et poings liés à Elena.

T’es pas son style, Haller. Casses-toi qu’il aurait pu ajouter que cela t’aurais sans doute fait trop rire pour ton propre bien. Qu’il se rassure le garçon, il est charmant, mais loin d’être ton type. Ou bien est-ce parce qu’il est marié ? Ou qu’il a été ton élève ? Sans doute. Merci du compliment Haller. Aller, ta gueule. Tu réponds à sa pique d’un signe de la tête. Tu ne sais pas ce qui se dit avec sa femme et au fond, en plus de ne pas te regarder, t’en a pas grand chose à faire. Cependant, si Professeur Ollivander a besoin d’un bout de lit, il sait qu’il peut venir squatter, religieusement hein, j’vous vois, ton pieux. Tu dormiras - pour le peu que tu pionces - sur ton canapé. Qu’il vienne toquer à ta porte, tu répondra présent, comme tu l’as toujours fait pour lui. Les autres ? Système TTD. T’es prof ? Tu Te Démerdes. Ah mais t’es un casse couille avec tes autres collègues. Puis il te lâche que sa femme lui casse les couilles, de manière sévère. Bon, t’es fixé. Y’a vraiment quelque chose qui te va pas chez cette nana. Puis le sujet des cours. Okay. On part dans ce genre d’histoire. Allez, Grayson Ollivander, vendez nous du rêve. Quelle connerie a encore été sortie ? Potion Tue-loup ? Bon, t’es loin d’être une lumière en potion mais tu sais à quoi elle sert. Visiblement, pas une septième année. Tu retiens à peine ton léger rire. Tous des pignoufs.

“On atteint des sommets cette année. Et ce n’est que Septembre mon lapin. On va se les coltiner pendant encore bien huit mois. Attends. Bucks ? Si elle savait aligner trois neurones, cela se saurait. Elle lit et écoute ce que tu peux raconter au moins ?”

Choix d’arrêter la phrase ici. Parce que toi, faire un discours sur le respect, c’est comme Black et Gaunt, ça va pas ensemble. Tu t’enfonces un peu plus dans ton petit siège, tout en l’observant rayer la réponse de miss Misty. Tu le laisses faire sa vie. Actuellement, il va juste te parler et tu vas te contenter de lui répondre. C’est pas plus mal. Tasse de thé terminée, lui ne boira pas le tien. Eh ça va hein, t’as pas la dragoncelle non plus. Il préfère son petit thermos. Petit Thermy. Il dort. Ton cul qu’il dort. Il n'a pas la gueule du gars qui dort dans son lit, tranquillement. Puis il complète. Sur le canapé. C’est déjà un peu plus crédible. Parce que c’est la vérité.

“T’sais que si l’Autre te les brises trop et que Madame décide qu’elle prend le lit, j’te laisse squatter le miens. Pour pioncer hein. Rien d’autre. J’suis pas ton style de toute manière.”

Précision apportée, tu reposes ta tasse sur la table la plus proche. Et toi hein, ta gueule. Bah ouais, il fallait bien que le sujet des cernes te soit retourné. Parce que vu ta tronche, on dirait que t’as pas dormi, que ce soit de manière peu convenable ou juste dormi tout court, depuis 72h et que tu t’es arraché les cheveux avec tes élèves.

“C’est ma tronche de tous les jours. Que crois-tu, et je l’entretient en dormant de manière relativement chaotique.”

Pour faire simple, t’es juste insomniaque sur les bords et tu dors très mal. Cauchemar sur cauchemar. Parfois, proche de la sensation d’y laisser ta peau édition appréhension du 1,2,3 Soleil de Squid Game. Pas serein à la tombée de la nuit le gars, on pourrait presque croire que tu as peur du noir. Pas vraiment. Tu as surtout peur de la solitude, de ce que tu te complais à apprécier en public. Mais qu’est-ce que ça peut te casser les couilles d’être seul. Complètement seul. L’angoisse qui te prend à la gorge. T’es faible en fait, derrière ta grande gueule. Ouais bah t’es juste humain en fait. Mais quand tu vois Grayson, cela te rappelle à quel point t’as pas du tout envie de te caser avec quelqu’un ! Les prises de tête à minuit plus une mandragore, ça te les briserait peut-être même plus que ton insomnie dûe à ton angoisse de la solitude. Et dans le noir, dites vous bien une chose, c’est pire. Alors tu passes ta nuit avec ta bougie, à lire, écrire, faire du thé, faire ta petite vie dans ton petit coin.

“Elle te les brise comment, la miss Helena ? Parce que si cela se trouve, vous allez trouver un accord pour qu’elle cesse d’entretenir ta tronche de zombie ?”

Il pense qu’elle est plus préoccupée par ses cheveux, ses ongles et les ricanements de Reyes. Et tu en penses la même chose. Parce que bon dieu que les deux peuvent te briser les miches. Et ils sont dans ta maison ? Eh bah, t’es pas sortie du sable toi. Tu le laisses continuer de parler, l’histoire de la manucure, elle te fait ricaner, voire même rire légèrement. Parce que de ton point de vue, c’est drôle, ce qui sera drôle aussi, ce sera sa tronche quand elle chopera un Troll ou un Décevant en potion ainsi qu’en histoire de la magie. T’es une sale tête de con quand tu le veux, et la miss Bucks, elle est dans ton collimateur depuis déjà un an ou deux. Le malaise de Grayson, il est palpable, il ne faut pas être empathique pour voir, savoir et sentir qu’il n’est pas à l’aise lorsqu’il s’agit de parler de sa femme. T’es presque prêt à lui dire de laisser tomber, mais voilà qu’il rambreille la conversation. Décidé à parler, le professeur Ollivander te confie qu’elle lui prend la tronche avec des histoires. D’accord. Pas de détails supplémentaires, cela ne te regarde pas. T’as pas vraiment envie de savoir en fait. Parce que cela risque de te casser d’autant plus les couilles si tu te retrouves dans leurs histoires de couple. Ton discours sur ton manque de sommeil lui laisse une porte ouverte à une pique amicale qui te vexe. Faussement vexé ceci dit. Parce qu’il en faut quand même plus pour te vexer, si l’on s’appelle Grayson Ollivander. Les autres, il n’en faut pas beaucoup. D’ici la fin du mois, début du mois prochain t’auras un costume tout frais payé par tes insomnies. Te regardes pas trop, tu risquerais de te faire peur. Mais tu te fais déjà peur. Y’a pas de soucis là-dessus. Tu te trouves même affreusement dégueulasse. Les femmes et hommes que tu as eut une nuit dans ta vie, c’est juste grâce à l’alcool.

Madame veut donc un enfant. Coup dur pour Grayson qui n’a pas l’air d’en vouloir. Un héritier qu’elle dit. Parce qu’il en faut, sang-pur, et tout le blabla qui va avec. T’as pas ce problème toi, t’es pas un sang pur, t’as pas besoin d’avoir un héritier. Au contraire, si l’on en écoute certains et certaines, ce serait même mieux que tu n’ai pas d’enfants. Parce qu’il ne faut pas que les né-moldus peuple la société magique d’êtres impurs. Et la suite, on la connaît. T’en a assez bavé durant ton adolescence par rapport à ça, c’est pas pour que l’on vienne te casser les noisettes avec ces histoires maintenant que tu as presque le demi siècle. Il a du mal, à la maison, c’est juste ça sans doute. Tu doutes mais tu gardes ça pour toi, non, t’es plutôt du genre à aller voir la nana et lui parler directement à elle plutôt que de parler sur son cul avec son mari. Et toi alors ? Comment tu vas ? Entre deux insomnies, deux tasses de thé, de café et quelques dizaines de points enlevés à des retardataires ? Oh bah ta vie se porte comme une vie de merde. Mais cela pourrait être pire. Bien pire.

“J’ai une vie pourrie, un mood pourrie. Mais j’ai vu pire. Début d’année tranquille, à voir comment les gamins vont s’en sortir. Et si tu parles de ma vie perso, personne. J’ai personne. J’aime bien ma solitude. Elle me permet de réfléchir. Sinon … J’sais pas. C’est meh. Disons que ça va, ça pourrait être pire.”

Et non, Destin, Karma, Buddha, c’est pas une invitation à ce que ce soit pire. Vraiment pas. Sinon, le Hogwarts Express, tu vas te le bouffer, et pas en tant que passager. Ah ouais, parfois, dans ta tête, c’est le bordel, un Bagdad organisé en véritable orgie de bullshit. Tu finis par te redresser, jeter un coup d’oeil à la tasse de Grayson. Ouais, il n’y a pas toucher. Ce serait dommage de le jeter, ce thé. Alors tu te saisis de la tasse, après la tienne. La tienne est posée dans un coin, eh, la vaisselle, tu la feras plus tard. Hors de question de la laisser aux elfes de maison, c’est bon, tu sais la faire comme un grand. Celle de Grayson, tu la bois d’une traite. Erh. Le thé est froid. C’est pas ouf. Mais toujours mieux que du café froid. C’est infecte. Comme toi.

“Mais t’inquiètes pas pour moi va, j’suis p’t’être vieux, con, et invivable, mais j’en suis pas à mon coup d'essai. Il en faut plus pour me crever. Prends soin de toi avant toute chose Grayson. Ma proposition, celle de squatter mes appartements, elle tient toujours. Quand tu veux. Et si t’a besoin de quelque chose, hésites pas. Pour toi, j’peux éviter de trop râler.”