She's a dark soul with a heart of gold • Ft. Lily Evans

Vent frais de la rentrée. 11 septembre qui montre le bout de son nez. Fin de ton calvaire mensuel. Il n’était pas trop tôt. Nuits passées à crapahuter dans la forêt interdite avec tes amis. Ton corps porte encore les traces de la fatigue maladive harassante à chaque fin de pleine lune. Plusieurs années. Cela fait plusieurs années que tu mens à celle que tu pourrais considérer comme faisant partie de tes meilleures amies. Il serait peut-être temps de la mettre au courant tu ne crois pas ? Mais la peur est toujours là, attrapant tes poumons, les oppressant à t’en faire perdre le souffle. Et si elle te fuyait ? Et si elle te rejettait ? James, Peter et Sirius ne t’ont pas rejeté, eux. Et Lily fait preuve de bien plus de compassion ainsi que de compréhensions que les trois abrutis qui forment le club des 4 avec toi. Elle est cette fille qui vit un des pires calvaire mais qui est faite d’un cœur d’or. Tu lui fais confiance ? Oui. Alors ne te poses plus de questions. Cela fait trop longtemps que tu lui mens pour la protéger. Mais la protéger de quoi . De toi ? Ou alors c’est pour te protéger toi ? Dans un geste égoïste d’avoir peur de lui faire peur, de devenir ce qu’elle craindrait le plus ? Peut-être un mélange des deux. Tu ne peux plus te permettre de lui mentir ouvertement, pas après tout ce que vous avez vécu ensemble. Alors c’est décidé, tu vas le lui dire. Le pont suspendu est un endroit que tu aimes tout particulièrement. Pont de bois grinçant sous les pas des plus rapides. Pont de voix aussi vieux que le monde faisant la jonction entre le château et la forêt interdite. Pont de bois te connaissant presque par cœur avec le temps que tu peux y passer, seul, juste pour sentir la brise automnale venir frôler tes mèches châtain déjà parsemées, à certains endroits, de quelques mèches grisâtres. Stress, angoisse, fatigue, lycanthropie. Tant de facteurs qui se retranscrivent dans tes cheveux qui ont l’air pourtant si doux.

“Lily j’ai- non commence pas comme ça, tu crains Remus. Mais tu crains ! Bordel le dire aux pignoufs a été plus simple ! Pourquoi-”

Tu t’énerves seul. Tu t’énerves seule sur ta propre incapacité à parler de tes propres problèmes, de résoudre ce qui ne vas pas chez toi. Aider les autres, c’est bien mon loup, mais s’aider soi-même serait une bonne chose aussi. On dit que pour aider les autres, il faut commencer par s’aider soi-même. Ce qui est partiellement vrai. Parce que toi, tu fais preuve d’adaptation et tu t’aides en aidant les autres.  me charitable pourtant au bord du gouffre de temps à autre. Tu marmonnes, tu répètes, encore et encore. Encore et encore. En espérant, secrètement, que Lily ne vienne pas. Qu’elle ait mieux à faire avec d’autres personnes que tu pourrais juger, à tort, plus fréquentable que ta pauvre loque. Soufflé coupé en entendant des pas distincts dans ton dos. Pitié que ce ne soit pas elle.

“Lily..! Je … J’ai pensé pendant un temps que tu ne viendrais pas- J’suis con désolé? Comment est-ce que … tu vas ? Je suis désolé pour le banquet de rentrée, James et Sirius ont été con. Pour ne pas changer.”

On en revient toujours au même point avec toi. Tu évites tes problèmes en parlant des autres. Il va falloir que tu prennes ton courage à deux mains. Mais qui a dit que tu en avais hein ? Du courage ? Le choixpeau. S’il t’a mis à Gryffondor, c’est bien qu’il y a une raison non ? Outre ta gentillesse semblable à celle des Poufsouffle, ton envie d’apprendre semblable à celle des Serdaigle et quelques points te concernant - plus nombreux que l’on voudrait bien le croire - semblable à certains et certaines chez Serpentard, si tu as été foutu chez les courageux, ce n’est pas pour rien. Ce n’est pas pour ta bonne bouille que le vieux couvre-chef t’a envoyé chez les rouge et or. Un souffle trahit tes lèvres. Sec. Angoissé. Anxieux. Mettez-y le nom que vous voulez. T’es pas au mieux de ta forme pour ne pas changer. Et Lily en a sans doute marre, assez, de te voir mentir pour une raison complètement idiote et absurde.

“Il faut- Et merde. Il faut que je te dise quelque chose … que ça reste entre nous et- s’il te plait ne prend pas peur.”

C’est pas comme cela qu’elle ne va pas avoir peur tu en as conscience ?  C’est le meilleur moyen de la faire paniquer pour toi et pour elle.

Deuxième weekend à Poudlard. Le calme semblait être revenu, du moins en partie, appréciant la brise fraîche venant s’amuser à faire voleter une mèche ou l’autre, boucles carmines dansant au gré de ses envies. La belle ne se faisait pas d’illusion, elle savait qu’après le calme venait la tempête et pourtant, elle savourait, préférant rester dans l’instant présent et abandonner cette boule de stress qui l’avait malmenée plusieurs jours durant. Sa vie ne pouvait se résumer à eux. Elle ne pouvait se résumer à cela, ici pour apprendre, pour s’amuser et surtout pour ressentir la magie qui habitait même l’air, emplissant ses poumons d’une euphorie nouvelle. Entre ces murs, elle cherchait à oublier la dure réalité. Sa différence, un pied dans chaque monde sans appartenir à aucun. L’éloignement, qu’il soit avec sa sœur qui l’avait rejetée ou plus tard, une fois ses études terminées, avec ses parents. Les préjugés qui la poussaient à se courber et lui avaient déjà fait perdre une amitié chérie désormais réduite à néant. A Poudlard, Lily cherchait à obtenir un entre-deux, une protection contre toutes les intempéries qui s’abbatteraient sur elle tôt ou tard, car elle ne se faisait là aucune illusion. Seulement il n’était pas toujours facile de se ressourcer et d'oublier quand les événements poussaient à la blesser. A l’énerver. Chaque année mouvementée avec en son cœur, les bêtises des Maraudeurs.

A cette pensée, ses iris se posèrent en direction du sol, là où le weekend dernier, il s’était trouvé. Souvenirs dont elle ne saurait dire s’ils étaient bons ou non, foncièrement pensive à l’évocation de ce jour. Aucun pas ne venait briser le silence aujourd’hui alors qu’encore une fois elle se trouvait dans la volière, sa lettre envoyée depuis longtemps et s’apprêtant désormais à rejoindre la terre ferme. Remus lui avait donné rendez-vous au vieux pont de bois, passerelle entre le château et la forêt et elle ne voulait décemment pas être en retard. Les dernières fois qu’elle l’avait vu, il avait été plus difficile de lui parler, ne sachant comment l’aborder. Ou plutôt comment lui avouer, profondément mal à l’aise de lui cacher connaître son secret. Elle savait cette conversation plus que difficile et intérieurement, elle redoutait qu’il nie ou pire, la rejette, par peur ou autre sentiment qui pourrait le tenailler. Jamais elle ne lui en avait voulu de ne pas lui en avoir parlé, son silence plus que légitime toutefois, elle ne pouvait plus supporter qu’il affronte tout ça seul. Il n’avait pas mérité pareil sort et il était de son devoir en tant qu’amie d’en alléger un tant soit peu le fardeau. S’il acceptait. Restait à lancer la discussion.

Son ascension sur les pelouses puis les lattes du pont grinçant sous son pas se fit calmement, ressassant leurs derniers échanges et tentant de percer le mystère. Que lui voulait-il ? Surement n’était-ce qu’une simple échappée afin d’apprécier l’air frais, sachant pertinemment qu’il adorait ce lieu mais plus encore en solitaire. D’ordinaire, elle ne serait venue percer la quiétude qui l’habitait, préférant le laisser à ses songes mais aujourd’hui… Il lui avait demandé d’être présente. Alors elle était là, lui souriant avec tendresse tandis qu’elle lui faisait un léger signe de main en guise de salut. « Remus ? » Sa première constatation fut incontestablement qu’il était nerveux, du moins si on en oubliait son visage, ravagé par la fatigue et l’étrange maladie qui donnait à son teint une couleur de craie. Elle n’en fit toutefois pas étalage, préférant paraître naturelle et avenante pour lui faciliter la tâche. « Pourquoi ne serais-je pas venue, voyons ! Et pourquoi tu t’excuses ? Tu devrais faire une sieste, je crois que cela te ferait le plus grand bien. » Pour apaiser les tensions qui semblaient le ronger, oui, mais aussi pour lui redonner quelques couleurs, n’ayant visiblement pas pleinement repris de ces nuits de pleine lune. « Oh je t’en prie, ne parlons pas d’eux ! Je les ai assez vus et entendus pour toute une vie, crois moi… Et si je te rejoins sur ce point, puisqu’ils ont visiblement fait fort cette année, ce n’est pas à toi de t’excuser de leur mauvaise conduite ! » Il en avait toujours été ainsi et elle n’avait jamais compris. S’ils n’étaient pas capable de le faire ou pire encore, voir qu’ils avaient mal agi, pourquoi serait-ce à un innocent croulant sous le poids de leurs responsabilités d’en assumer les torts sous couvert de leur amitié ? Elle vivante, elle n’accepterait qu’ils l’utilisent ainsi. Là n’était toutefois pas le sujet puisqu’il reprit la parole, avec plus de mal encore, pour tenter de lui avouer quelque chose. La tension mêlée à la peur qui émanait de lui tout comme la portée de ses mots lui firent instantanément comprendre, écarquillant un traître instant les pupilles sous la surprise avant de venir elle aussi s’accrocher à la balustrade pour admirer la vue. Devait-elle le laisser prendre son courage à deux mains et se soulager ? Ou abrégerait-elle ses souffrances quitte à le faire paniquer ? Aucune des réponses ne semblaient être la meilleure, aussi préféra-t-elle lui tendre la main afin de l’aider à passer l’épreuve. « De quoi devrais-je avoir peur, Remus ? » Lentement, ses émeraudes vinrent se ficher dans le regard troublé du gryffondor dont la détresse perçait par tous les pores, ses lippes esquissant le début d’un sourire à la fois tendre et triste. « Que tu sois un loup ? » La question avait été posée de façon anodine, bien qu’emplie d’une certaine douceur d’où aucune peur ne filtrait. Parce qu’elle n’avait pas peur de lui, non, pas plus pitié. Et elle voulait lui faire comprendre qu’il pouvait comme toujours se confier, prête à étendre cette bulle protectrice dans laquelle personne ne pourrait le blesser.

Alors elle est là. Elle sourit. Avec tendresse. Alors elle est là, elle avance. Elle est toujours là pour toi. Tu t’en rends bien compte Remus ? De la chance d’avoir une amie comme elle ? Lily est une personne avec un cœur d’or. Tu ne le répèteras jamais assez. Tu ne le diras jamais assez à James de ravaler sa putain de fierté pour elle. Parce que sinon, d’autres vont lui passer devant. Et honnêtement, dans un autre mode, tu lui aurais passé devant volontiers, à James. Juste pour lui apprendre à, parfois, faire preuve d’humilité. Juste pour lui apprendre à, parfois, ravaler sa fierté, à ne pas être le dernier des crétins. Pourquoi ne serait-elle pas venue pourquoi tu t’excuses ? Parce qu’elle aurait eu mieux à faire ? Parce que tu es comme ça ? Tu devrais faire une sieste. Oui. Elle a raison. Encore une fois raison. Lily Evans, demoiselle qui passe son temps à avoir raison avec toi. Elle te connaît presque par cœur. Elle te prit, avec toujours ce sourire tendre qui t’en tire un au final, de ne pas parler des Monstres de Connerie rejoint par miss Verpey. D’ailleurs, les points en moins et la colle des deux, tu l’as encore en travers de la gorge. Perdre des points dès la rentrée. Sérieusement. Tu ne leur en veux plus pour l’incident de la Cabane Hurlante, tu leur en veux pour ça maintenant. Tu vas passer ta scolarité à leur en vouloir pour tout et n’importe quoi si cela continue. De quoi elle devrait avoir peur ? Elle s’est rapprochée et toi, en bon couillon, en bon peureux de la décevoir, de lui faire peur, de la blesser, tu as eu ce mouvement de recul. Un pas. Un seul. Mais il est bien là. Ta propre peur de toi-même. Tu déglutis, parce que c’est vrai. T’as pas du tout manqué de tuer quelqu’un l’an passé. C’est complètement faux. Encore un mensonge saucé de Peeves. Son regard capte le tien. Cramé le louveteau. Tu es cramé mon petit chiot. Grognement à peine audible contre toi-même alors qu’elle te l’annonce. Elle devrait avoir peur que tu sois un loup ? Elle le sait déjà !? Qui !? Qui est le connard qui a balancé !? Saoirse ? Elle ne le sait pas encore. Ou si ? Peut-être ? Non, elle est trop douce avec toi pour te faire un coup pareil. Sirius ? Il t’a promis de garder le secret. Et tu lui fais confiance sur ce point là. Ton amour pour lui te fait croire qu’il peut garder le secret. James !? Y’as que lui pour faire une bourde pareil ! La panique te compresse la poitrine. Le souffle court, tu tentes tout de même de ne pas fuir. Courage. Tu devrais savoir faire ça quand même.

“C’est … C’est James qui t’a sorti ça ? Non parce que- … Ah l’enfoiré. Il avait promis de garder le truc pour lui.”

Après une courte réflexion, tu te rends compte de ce que tu viens de balancer. Que oui, t’es un loup. Et que James est au courant. T’en a encore combien, de secrets comme ça pour la douce Evans ? Et tu te rends doucement compte que tu n’as même pas pensé que Peter aurait pu, lui aussi au courant, vendre la mèche. Parce que c’est comme Saoirse, il est trop doux. Trop adorable pour te faire un coup pareil. Ta vue commence à se brouiller de fatigue, tu ne retiens plus tes émotions, elles te gouvernent pleinement et la peur de perdre Lily commence à faire monter des prémices de larmes à tes yeux.

“Lily … Je- J’suis pas le type que tu crois … Mais pas dangereux … Pas … pas vraiment. C’est compliqué-”

Souffle une nouvelle fois coupé. Comme si respirer, ton cerveau avait oublié comment le faire. Comme si le geste de survie le plus simple, tu en étais incapable. Mais tu ne suffoques pas pour autant, tu cherches juste ton souffle lentement. Tu détaches ton regard de la rousse. Tu ne peux plus la regarder en face. Plus pour le moment. Tes mains attrapent la rambarde en bois, ton front venant contre le bois vieilli par les affres du temps qui est passé sur ce vieux pont suspendu grinçant à chaque pas.

“Je suis un monstre, Lily … Les bêtes sanguinaires décrites dans les livres … pourquoi j’en serais différent ..?”

Parce que tu n’es pas assoiffé de sang. Parce que tu ne laisses pas la bête prendre toute la place. Parce que tu vis très mal ta lycanthropie, pas comme l’autre qui t’a mordu en vengeance des paroles de ton paternel. Les larmes roulent sur tes joues pour venir s’éclater au sol, contre les lattes de bois.